En mars dernier, Matthieu Corthésy, le fondateur de pme-web.com, a publié un article intitulé Top 100 des experts du web en suisse romande selon leur influence sur les réseaux sociaux. L’article s’est rapidement trouvé sous le feu des commentaires, la plupart remettant en cause la pertinence du classement réalisé avec l'aide de Klout, obligeant Matthieu à se fendre d’un article d’explications. Quelques semaines après cet événement, je suis allé voir Matthieu pour obtenir son ressenti sur cette expérience. 

Tout d’abord Matthieu, peux-tu te présenter, présenter ton entreprise et tes services ?

Avec plaisir ! Je m’appelle Matthieu Corthésy et j’ai créé le blog pme-web.com en 2012 car je trouvais à l’époque qu’il manquait de contenu lié au marketing digital spécifique à la Suisse romande. Je me suis donc lancé un peu dans l’inconnu, mais je ne regrette vraiment pas mon choix :-)

Je n’offre pas de « services » à proprement parler, car je blogue par passion pour la thématique du marketing digital. Mes articles de conseils que j’écris chaque semaine sont une forme de service selon moi, c’est pourquoi j’essaie toujours de répondre à un besoin réel des gens dans mes articles.

En mars dernier, tu as publié sur ton site un article où apparaissaient les 100 experts du web de Suisse romande. Peux-tu nous expliquer quel était le but de cet article ?

J’avais beaucoup aimé le travail réalisé par Martin Grandjean et Yannick Rochat sur Pegasus Data, et je trouvais dommage qu’il n’y ait plus ce genre d’outil à disposition pour la Suisse romande.

Sachant que je ne pouvais pas m’occuper de toute la Suisse romande, l’idée m’est venue de m’intéresser à tous les experts et pros du web romand car je connaissais la plupart de ceux-ci. J’avais rencontré une partie d’entre eux, mais mon sentiment était qu’il manquait des outils pour mieux les chercher. Un top 100 me paraissait être une manière didactique de les présenter.

Comment as-tu fait pour réaliser ce classement ? Quels ont été tes critères de sélection ?

Comme je ne voulais pas me limiter à une catégorie stricte, toutes les personnes actives dans le web au sens large étaient pour moi éligibles. Mon réseau allait constituer une base à laquelle s’ajouteraient toutes les personnes désireuses d’y figurer. C’est d’ailleurs cette notion que l’on peut considérer comme trop large qui m’a joué des tours une fois le classement publié !

La grande question a été de savoir comment présenter ces personnes. Au départ je voulais faire un classement sur le nombre de followers Twitter, mais cela n’était pas satisfaisant car les résultats pouvaient très facilement être manipulés.

Le Klout m’était apparu au final comme la moins mauvaise solution, même si elle était loin d’être parfaite. L’expérience a prouvé que j’avais tort sur ce point !

Combien de temps t’a demandé ce travail de sélection, de rédaction et de publication ? Et comment as-tu organisé le travail ?

Difficile de répondre précisément, sachant que la liste basée sur mon réseau a été montée au fil des années. Disons qu’une fois qu’elle était établie, j’ai tout compilé dans un fichier Excel et sur une liste Twitter.

La plus grande partie du travail a été au final de trouver et de tester le bon plugin WordPress pour présenter les résultats :-) (TablePress pour ceux que cela intéresse). Pour collecter les données sur Twitter, j’ai utilisé Riffle qui est excellent pour gagner du temps.

Les réponses aux commentaires de l’article ont été peut-être la partie la plus longue finalement ;-)

Toi qui publies régulièrement des articles, quelle place accordes-tu à celui-ci ?

J’avais envie d’intégrer dans ma ligne éditoriale des articles qui durent sur le moyen, voire long-terme, et ce genre de classement était parfait dans cette optique. Évidemment le travail à fournir est beaucoup plus conséquent, mais j’espère qu’il a pu être utile à mes lecteurs !

As-tu communiqué sur cet article via une newsletter ? As-tu partagé cet article sur les réseaux sociaux ? Bref, parle-nous un peu de la diffusion

Dans un premier temps j’ai communiqué de manière classique cet article avec des publications sur mon groupe LinkedIn sur le Marketing Digital en Suisse Romande (grâce aux 840 membres actuellement, cela permet d’avoir une diffusion intéressante), ainsi que Twitter, Facebook et d’autres groupes LinkedIn. J’ai également ajouté cet article à ma newsletter mensuelle.

Dans un second temps, j’ai contacté par email les 30 premiers membres de ce classement pour leur annoncer et leur demander de le partager. Une immense majorité a partagé cet article, ce qui lui a donné une belle exposition (je profite au passage pour les remercier :-)).

Quelle a été la réception faite à cet article auprès de ton auditoire, de ton lectorat ? D’où sont venus les inputs, de quel réseau, de quel canal ?

Beaucoup de réactions positives, d’autres personnes étaient surprises par la démarche. Le moins que l’on puisse dire, c’est que cet article n’a laissé personne indifférent !

As-tu été surpris du nombre conséquent de commentaires que cet article a généré ?

Ça a été la plus grande surprise à propos de cet article, le nombre de commentaires (on en est aujourd’hui à 70) ! On assiste normalement à une tendance dans le monde des blogs à moins de commentaires qu’à l’époque. Les conversations à propos des articles se déroulent principalement sur les réseaux sociaux et moins dans les commentaires des articles.

Alors voir autant de discussions dans les commentaires a été surprenant, mais réellement intéressant. Je pense que sachant que les noms de gens étaient présentés, plusieurs ont préféré répondre directement dans l’article plutôt que sur les réseaux sociaux. Et une chose en amenant une autre, les discussions ont continué à cet endroit.

En analysant de qui venaient les commentaires, peux-tu dresser pour nous un panorama de ton lectorat ?

Mon lectorat est assez hétéroclite, avec des personnes en recherche d’informations utiles et d’autres extrêmement calées dans le domaine et qui n’hésitent pas à donner leur avis quand ils pensent que je fais fausse route (ou que je fais des fautes d’orthographes). C’est une chance car cela me donne un regard externe et la possibilité d’améliorer les articles au fur et à mesure.

Un excellent exemple est ma série d’articles sur les offices du tourisme en Suisse. Après celui sur Ovronnaz, j’ai pu améliorer ma méthodologie grâce aux commentaires pour l’article à propos de Lausanne Tourisme.

Le défi que j’ai avec le blog est de trouver du contenu qui convienne à chacune de ces audiences. Et si on ajoute la segmentation Suisse/France/Francophonie, il n’est pas toujours facile de contenter tout le monde ! En tous les cas, mon moteur a toujours été d’écrire des articles qui m’intéressent, et ça m’a plutôt bien réussi jusqu’à maintenant.

Certains commentaires étaient vraiment vindicatifs, à l’instar de celui qui disait que « Ce classement ne veut absolument rien dire, les vrais experts en digital n’y apparaissent pas ». Comment as-tu vécu cette mise en accusation ?

Le réel problème avec ce type de commentaire est qu’il n’y a pas de solution proposée. Du coup tout le travail est remis en question sans possibilité de l’améliorer ! Je me considère comme une personne ouverte à la critique, mais surtout quand elle est constructive.

J’ai parfois eu l’impression que certains commentaires n’ont pas vu tout le travail de collecte et de présentation effectué pour cet article. Mais cela fait partie du jeu :-)

Dès le lendemain, tu as publié une mise à jour de cet article, sorte d’erratum. Quelles modifications as-tu effectuées, et pourquoi ?

J’étais conscient en partie des faiblesses de l’article au départ, mais je me suis dit au moment de le publier que ce n’était pas si grave et que personne n’allait le remarquer. Grosse erreur de ma part ! Tous les éléments dont je n’étais pas certains ont été remontés dans les commentaires.

J’ai également senti que ces erreurs avaient pu atteindre négativement certaines personnes (des oublis par exemple). Je voulais donc réparer tout ça au plus vite !

Je me suis donc dit qu’un article d’explication pouvait aider, et je crois qu’il a été bien reçu et compris par la communauté.

Peu de temps après, tu as changé le titre de l’article. Peux-tu nous en dire plus là-dessus, nous expliquer ce choix ?

La notion d’experts du web était erronée au final et cela avait été justement remonté dans les commentaires. David Labouré (que je remercie à nouveau) m’a proposé l’idée de pros du web qui semblait plus juste.

Il me semblait donc urgent  de procéder à ces modifications et de les expliquer à ma communauté.

Si je ne dis pas de bêtises, la vindicte s’est un peu essoufflée. Le calme après la tempête ?

Je ne sais pas si l’on peut parler de vindicte, cela me semble un peu fort dans mon cas. J’ai reçu beaucoup de messages d’encouragements par emails ou LinkedIn, du coup même s’ils sont moins visibles, ils étaient bien présents et au final majoritaires :-)

C’est le cycle classique sur le web et les réseaux sociaux, la montée est très rapide et forte, mais elle s’essouffle également rapidement (heureusement pour moi dans ce cas !)

Aujourd’hui, qu’est-il advenu de cet article ? Le classement existe-t-il toujours ? Fais-tu des mises à jour régulières ?

Après plusieurs semaines de silence à ce niveau, j’ai enfin mis à jour la liste :-) Mon but est de la mettre à jour chaque mois désormais !

Après quelques semaines de recul, peux-tu nous dire comment tu as vécu cette expérience ?

Énormément de positif, un peu de négatif, et beaucoup de stress au final ! Moi qui me demandais si le monde du web romand était actif ou endormi, j’ai eu ma réponse : il est bien vivant !

Dans un sens, l’idée de fédérer ce petit monde a été un succès, même si cela a été un peu à mes dépends dans un sens.

Vas-tu changer, ou même as-tu changé ton approche lors de la publication d’articles ? As-tu l’impression que cette expérience a modifié ton comportement de blogueur ?

J’ai pris conscience avec cet article que le blog commence à être de plus en plus lu, ce qui est évidemment très positif. La contrepartie est que je ne peux plus me permettre de ne pas réfléchir à l’impact d’un article comme à l’époque où ils étaient bien moins lus. Mais c’est un super défi !

Quels enseignements tires-tu de cette expérience ? Quels conseils peux-tu donner aux gens qui nous lisent ? Et aux blogueurs ?

Suivez votre instinct quand vous voulez écrire un article, vous êtes votre meilleur juge. Mais n’hésitez-pas à prendre en compte votre communauté et à améliorer vos articles au fur et à mesure !

As-tu quelque chose à ajouter ?

Merci beaucoup Dimitri pour cette belle opportunité de parler de mon expérience :-)